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1.02.2014

Les troubles du langage chez l'enfant

La prise en charge des troubles du langage chez les enfants et chez les adolescents représenterait environ 60 pour cent de l'activité des orthophonistes. Mais que recouvre cette notion ? S'agit-il de langage oral ou de langage écrit ? De simples difficultés ou de troubles avérés ? L'enfant est-il atteint d'un trouble de l'articulation, de la parole ou du langage, ou ses difficultés traduisent-elles un problème d'interaction avec autrui ?
Dans leur Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage, les linguistes ont proposé la définition suivante du langage : « Le langage est la capacité, spécifique à l'espèce humaine, de communiquer au moyen d'un système de signes vocaux (ou langue) mettant en jeu une technique corporelle complexe et supposant l'existence d'une fonction symbolique et de centres corticaux génétiquement spécialisés. Par les problèmes qu'il pose, le langage est le lieu d'analyses très diverses, impliquant des rapports multiples : la relation entre le sujet et le langage, qui est le domaine de la psycholinguistique, entre le langage et la société, qui est le domaine de la sociolinguistique, entre la fonction symbolique et le système que constitue la langue, entre la langue comme un tout et les parties qui la constituent, entre la langue comme système universel et les langues qui en sont les formes particulières [...], tout cela étant le domaine de la linguistique. »
Mais comment ce « langage », spécifique à l'espèce humaine, se développe-t-il chez le petit enfant ? D'ailleurs, le langage se développe-t-il, s'apprend-il, s'acquiert-il ou se l'approprie-t-on ? Nous allons aborder ces différentes questions sur lesquelles se penchent linguistes et psychologues, sociologues et philosophes, orthophonistes et neuroscientifiques.

Le langage se met en place

Selon les psychologues du langage Lev Vygotski (1896-1934) et Jerome Bruner (né en 1915), les débuts du langage se situent dans les comportements de sociabilité de l'enfant : le langage ne peut se développer qu'avec d'autres membres de l'espèce, puisque sa fonction première est de permettre la communication entre pairs. En l'absence de colocuteurs, le besoin et l'envie de « parler » n'existent pas. La question préoccupe depuis longtemps.
On raconte à ce propos qu'au XIIIe siècle, Frédéric II, l'empereur du Saint Empire germanique, voulut savoir quelle était la langue « naturelle » parlée à l'origine par l'homme : il donna l'ordre à des nourrices s'occupant de bébés placés dans une pouponnière de ne jamais leur parler. Alors que Frédéric IIespérait que la langue originelle qui apparaîtrait chez ces bébés « sans influence extérieure » serait le grec ou le latin, ces bébés moururent…
Cette expérience ne fut heureusement pas répétée, et la question des spécificités du langage humain et des conditions nécessaires au développement linguistique a mis du temps à être élucidée. Aujourd'hui, on connaît les conditions indispensables à la mise en œuvre du langage. Énumérons-les : l'appareil auditif et l'appareil laryngé (le larynx) doivent être en interaction, chacun exerçant son contrôle sur l'autre. Le sujet doit être capable de se représenter le monde et les objets absents, de produire et d'utiliser des signes dont le sens est partagé par tous, et d'assembler des mots et gestes signifiants.
Cela nécessite des conditions physiques et physiologiques, mais également des aptitudes cognitives (symbolisation, représentation mentale, abstraction), des capacités mnésiques, ainsi que des conditions psycho-socio-affectives, telles que le désir de communiquer, des interactions sociales ou encore des liens affectifs. En d'autres termes, pour être en mesure de « parler », c'est-à-dire de produire un langage oral, l'être humain doit tout d'abord être en mesure d'entendre les langages parlés autour de lui. Et, au tout début de sa vie, ce sont les langages parlés par...

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